IN ÉIREANN 2 PREMIERES FALAISES
Le soir même, après Silver Strand, nous faisons route jusqu’au port de Belmullet, curieusement situé sur l’isthme qui commande une presqu’île au relief assez plat qui contraste avec l’ampleur des falaises environnantes. Nous sommes désormais dans le comté de Mayo, réputé délaissé des touristes. Mais la différence ne fut pas flagrante à nos yeux, car à part deux ou trois endroits bien connus des guides, nous ne vîmes pas grand monde de tout le voyage.
A l’accueil de l’hôtel, à la façon irlandaise, où le simple bonjour anonyme n’existe pas, la femme s’enquiert de nos projets. A l’énoncé du Portacloy Loop-cliff walk, elle nous le déconseille. Les prévisions météo sont mauvaises, ça n’est pas un temps pour les falaises ! Elle essaie de nous vendre la route côtière, le phare – qui a eu un rôle déterminant dans la date du débarquement allié... Mais que voulez-vous, nous sommes là pour Portacloy et sauf déluge total, il est fort probable que nous nous obstinions !
Comme la veille, le repas est bon et ce sera une constante, que l’Irlande ne partage pas forcément avec l’île voisine. Un seul exemple, je n’aime la purée de pomme de terre que là bas !
Le lendemain, nous voici donc à Portacloy, dans la pluie et le brouillard. Le « chemin » part d’une plage très encaissée pour longer la falaise. A un endroit, la côte s’élève jusqu’à 200 m. Nous renoncerons à y aller, non pas à cause de la pluie, nous sommes à ce moment déjà trempés, mais parce qu’elle est complètement dans les nuages. J’ai mis chemin entre parenthèses, car au bout d’un moment, comme presque toujours, le chemin disparaît, devient une vague trace. Il faut ajouter que les sols sont détrempés, et je ne parle pas des tourbières. L’eau stagne partout, même sur les pentes raides, ce que je n’arrive pas à comprendre. Seul salut, venu de mes petites connaissances botaniques : les bruyères, en effet bruyère = sol sec (relativement!). Là où elle poussent donc, ça devrait être moins mouillé! Et de fait, ça c’est toujours vérifié. Les taches mauves indiquent donc, comme les pierres d’un gué, là où le pied peut prendre appui.
Le point très positif est qu’à l’inverse de notre premier séjour, dans le sud-ouest, le bord des falaises, pâturé par les moutons était accessible. Je me souviens de terribles frustrations de ne pouvoir voir le littoral qu’en des spots aménagés ad hoc (et payants...). Ce fut ainsi durant tout le séjour, si bien que nous pûmes aller à chaque fois au plus près de l’abîme.
Voici quelques images sauvegardées (beaucoup étant vérolées de gouttes de pluie) de la randonnée écourtée, avec au retour moins de brume et des vues plus nettes sur les falaises.
L’après-midi s’annonçant tout aussi maussade, nous explorons la côte vers l’est jusqu’à Downpatrick Head, un des rares lieux connu du comté. Les falaises y sont noires et un étonnant stack témoigne de l’avancée ancienne de la pointe. Une grotte traverse entièrement la pointe et passe sous un « regard » naturel dans les terres. La verte carpette en monticule est célèbre sur le Net aussi, j’ai cru à des arméries au départ, mais au final je ne sais ce que c’est. En tout cas, c’est unique.
Au retour, non loin de la pointe, nous visitons Ceide Fields, site archéologique qui est le plus ancien système de champs connus et qui a 5500 ans. Le site lui même n’est pas très parlant au profane, mais un musée est là pour expliquer la chose. Les champs, qui étaient déjà clos de murs, ont été redécouverts à partir de 1930 sous des mètres de tourbe. Ces agriculteurs en effet, vivaient sous un autre climat. Quand le climat est devenu celui que nous connaissons, l’eau s’est mise à stagner avec les pluies constantes, la tourbière a commencer à se constituer et les hommes sont partis. J’ai été fasciné par cette histoire qui m’a fait prendre conscience de la dureté de certains coins d’Irlande pour la vie humaine. Et d’ailleurs, le lendemain, pour quitter le Mayo, nous traversâmes sous une pluie constante et une luminosité de novembre, des dizaines et dizaines de kilomètres de tourbières (hors zone montagne), sans le moindre village.
Falaises au pied du site et "lanterne" d'observation du musée.
Une dernière photo prise à la volée de la voiture, témoignant de l’invasion des pontiques. Les petits points vert clair sont des semis.