MISSION CEVENOLE 5
Un programme fait de bric et de broc aujourd’hui pour égayer la vie claustrale de mes chers lecteurs.
Tout d’abord, nous n’empruntâmes qu’une fois la route menant de notre prieuré au bourg dont il dépend, Peyremale, qu’on nous avait dite être peu commode. Ce n’était pas mensonge, mais à ce moment de notre séjour, frère Karagar, chauffeur en titre, avait acquis une solide expérience de la route cévenole, aux lacets innombrables, et surtout étroite, ô combien étroite, sur laquelle la voiture adverse se complaît à rouler vite et fort peu à droite… Grâce à cet itinéraire inédit, nous nous retrouvons après moult virages, de l’autre côté de la vallée, profitant ainsi d’une vue sur le village du prieuré. Hélas, notre cloître est caché derrière un arbre, à gauche de la dernière maison de droite…
Nous fîmes ensuite une marche méditative et accidentée autour de la vallée d’une petite rivière. Conifères, chênes verts, schiste brun, le paysage que vous montrent les photos qui suivent sont plus caractéristiques de notre environnement quotidien que tout ce que vous avez pu voir jusqu’à présent. Le plus étonnant pour moi (car la température ici, autour de 450-600 m, n’a rien à voir avec celle des hauteurs du mont Lozère) est de voir autant de bruyères par cette chaleur.
En bas, au pied d’un petit pont de pierre qui n’est là que pour notre sentier, nous trouvons assez de profondeur d’eau pour un petit bain rafraîchissant.
En remontant, nous trouvons le hameau de Bournaves, où se trouve un clocher de tourmente. C’est le seul qui ne soit pas sur le mont Lozére, ni en granit (il n’est d’ailleurs pas sur la liste qu’on trouve de ces édicules). « Bâtis au début du XIXe siècle par les habitants de ces hameaux, le rôle primitif de ces clochers est de permettre aux voyageurs de ne pas s'égarer et périr, si d'aventure ils se retrouvaient pris dans « la tourmente ». Ce terme désigne une redoutable intempérie qui naît en altitude au cours des rudes hivers, lorsque chutes de neige et bourrasques de vents violents se conjuguent. Dès que sévissait la tourmente mais aussi par temps de brouillard, les cloches étaient alors actionnées, parfois nuit et jour, fournissant ainsi un repère sonore aux voyageurs, un peu à la manière d'un phare pour la navigation maritime, afin qu'ils puissent s'orienter vers les habitations. » Wiki.
L’édifice à l’arrière pourrait faire penser à une chapelle, alors que le vrai clocher de tourmente est isolé, mais c’est si petit qu’un homme ou deux, pas plus, pourraient y entrer.
En tout cas, le village a beaucoup de charme.
Désireux de faire notre soirée ce soir-là dans une auberge – les autres soirs nous dînons au cloître, bien évidemment – à Saint Ambroix, dans un moulin ruiné qui surplombe la Cèze où nous pourrons nager avant le repas (eau très chaude cette fois), nous prenons la route idoine et faisons une halte à Aujac pour son château fort. Mais nous avons de nouveau rendez-vous avec une église romane dotée d’un clocher peigne devant lequel Frère Vladimir prendra un thé, sur la place, comme à son habitude quand il fait très chaud. Cette fois, j’ai la précision que le clocher est rajouté au XIVème siècle, ce qui confirme l’impression que j’avais eu à Concoules. L’église est du XIIème, toute petite une fois de plus mais en grand appareil et me rappelle de ce fait l’art roman provençal.
Nous montons ensuite au château, qui domine toute la vallée de la Cèze, à 600 m d’altitude. Nous ne souhaitions pas le visiter mais cette année il est exceptionnellement fermé à la visite. Nous tombons sur la propriétaire à la grille, qui navrée de devoir nous laisser dehors, nous offre une carte postale du château très sympathiquement.
Après une journée aussi harassante, Dieu pardonnera à frère Karagar un petit rafraîchissement non aqueux à son arrivée au Moulin du Roc Tombé.
Le soir, pour rentrer, nous repassons comme chaque jour par le col de Portes, bien protégé par son château. Il est donc temps de rendre hommage à cet édifice construit en deux temps, de manière bien visible. Une partie médiévale, un vrai château fort, et le château neuf, qui malgré son style date de la fin du XVIème et du début du XVIIème ! Il a été construit avec un angle unique de 49° qui le fait ressembler à la proue d’un navire (je n ‘ai pas trouvé d’explication claire à cela).