AU PIED DU MONT
L'arrivée dans les Alpes se fait sans préliminaires. J'imaginais que passer du paysage morne de Bourg en Bresse au Mont blanc se ferait dans un lent crescendo de contreforts mais il n'en fut rien, après deux ou trois petits tunnels, on se retrouve dans des vallées profondes qui ne laissent pas voir grand chose. Et puis soudain, du parking d'un supermarché où nous faisons nos provisions, je le vois, alors que nous avons encore un peu de route à faire.
Notre chalet se trouve à proximité immédiate du village de Bionnassay, au bout d'un long chemin dont la dernière partie n'est pas vraiment carrossable à moins de rouler, comme beaucoup par ici, en 4x4. La voiture doit donc être garée à 150 m en amont et le débarquement des bagages fut un peu sportif. Apparemment, ici il a fait très beau, puisque, selon le proprio, les plaques solaires ont chargé la batterie à bloc. Il précise que, par temps très gris, le frigo s'arrête parfois la nuit. C'est un jeune homme qui a étrangement comme prénom le nom de la ville d'Australie que Tintin n'atteindra jamais. Une partie du chalet était son propre logement, où désormais il " n'a plus le droit" sic, d'habiter depuis qu'il est marié. L'eau coule directement de la montagne, et les toilettes sèches sont à 50 mètres, à la lisière d'un bois, où, selon S., on peut appervoir des cerfs et autres animaux sauvages. J'aurai à coeur de faire mes besoins porte grande ouverte, espérant ce genre de visiteurs, mais je n'eus pas cette chance.
Nous sommes près du Mont Blanc, (9 km), trop près pour le voir! Les sommets visibles sont le Dôme du Goûter, 4300 mètres, troisième sommet français et importante étape sur le chemin du Mont Blanc et l'aiguille de Bionnassay, justement, elle aussi appartenant au club très fermé des 4000. Mais, ni l'un ni l'autre ne sont visible malgré le beau temps, car justement il y a un bouchon nuageux à 4000 mètres qui semble avoir là ses quartiers d'été. Ce que l'on voit bien, c'est l'aiguille du Goûter, à 3800, où se trouve le dernier refuge avant le Mont.
Comme on le verra par la suite, il me faudra un peu de patience pour le voir enfin, ce maudit Mont Blanc. Le lendemain, le temps est mitigé mais correct, et nous partons à pied du chalet en direction du front du glacier de Bionnassay, le plus petit des glaciers du massif.
Déjà des cailloux dans les chaussures ! Nous traversons une première fois, en bas, le torrent issu du glacier.
L'eau est tellement froide que l'atmosphère est glaciale dès qu'on s'en approche. Je vérifie la température de l'eau.
Nous grimpons dans les conifères et arrivons à une belle cascade sans nom:
En chemin, quand, les arbres s'éclaircissent, voici qu'apparait une plante à laquelle, personne ne me croira, je n'avais pas songé une seconde. Tellement associée qu'elle est dans ma tête aux Pyrénées. Alors qu'elle fut sans doute décrite pour la première fois dans les Alpes, et que son nom allemand fait référence aux Alpes : le rhododendron férugineux. Je suis content de capturer une belle inflorescence bien formée, ce que je n'avais pas vu encore. J'étais loin de me douter de ce que je verrais ensuite...
Nous arrivons enfin au premier but de notre randonnée, après nous être élevé de 400 m. C'est un endroit fort impressionnant, là où le torrent s'échappe du glacier et commence à dévaler la pente. Le débit est énorme.
Pour le traverser, une passerelle dite himalayienne qui ne me rassure guère. Je passe sans trop de peur.
Le front de glacier n'est guère visible sous les moraines qui le recouvrent. On croit voir des pierres uniquement mais il y a de la glace dessous.
Le réchauffement accentue ce phénomène de recouvrement de pierres, qui lui-même diminue l'albédo du glacier par sa couleur grise... et augmente son réchauffement. C'est un cercle vicieux. Pour espérer voir le glacier vraiment il faut monter encore en le contournant par sa rive droite dans une belle prairie d'altitude.
Le temps devient vraiment menaçant. Et j'apperçois mon premier névé. Et je cours mettre mon cul sur la neige.
Nous piqueniquons dans la brume et le froid à 2000 m. Nous avons monté de 700 mètres. Bonne première mise en jambes. Après, le chemin devenait plus raide et surtout la météo ne nous incitait pas à poursuivre.
Quand on retraverse le joli village de Bionnassay , - est-ce la baisse d'altitude ou l'heure? - , le temps s'est bien amélioré.
Un peu de travail pour Cornus quand même !