LETTRE AU DIRECTEUR DES PONTS ET CHAUSSEES
Monsieur Le Directeur,
Mon rapport arrivera bien tardivement sur votre bureau, je ne l’ignore pas, et je sais aussi que je mets votre patience à rude épreuve. Pour tout cela je vous prie bien humblement de m’excuser, vous savez dans quelle nature hostile nous évoluons, ici à Biscaeraz. Saisissant un rare moment de conditions favorables, j’ai mis toute mon énergie à faire avancer les travaux et c’est ainsi que j’ai négligé mon compte-rendu. A l’énoncé des résultats, vous me donnerez raison, je le sais, car en effet, les nouvelles sont bonnes.
Après de longs mois d’indécision, hésitant sur la forme à donner à la base du phare et sur d’autres données techniques, j’ai finalement décidé, fort de mon expérience à la tour des Héaux de Bréhat, d’utiliser au plus près la forme de la roche de Biscaeraz, si redoutable à la navigation. Au prix de quelques enrochements (nos ouvriers durent remonter la plus lourde de ces roches de la proche vallée Pontique), je trouvai le biais pour économiser le ciment Portland si coûteux. L’administration, j’en suis sûr, m’en saura gré.
A terre, les travaux continuaient, pour enduire le phare de couches de protection contre les embruns. La mer est proche, Monsieur le Directeur, ce qui est normal, pour un phare.
A l’heure où je vous écris, la première coulée de Portland a eu lieu et la cave et local technique du phare est déjà visible.
Suite à quelques ennuis techniques dont je vous passe le détail, quelques réaménagements devront avoir lieu avant la seconde coulée qui donnera sa forme définitive au socle du phare.
Mais d’ores et déjà, Monsieur le Directeur, je peux vous l’affirmer, la roche de Biscaeraz est vaincue.