QUEL ECRIVAIN A DIT "J'HABITE CHEZ MON CHAT"?
Je me souviens des lettres administratives adressées à ma mère au nom de Madame suivie du prénom et du nom de mon père. Ce déni d’identité m’étonnait mais je ne mesurais pas à l’époque ce qu’il disait du statut encore assez récent de la femme dont les us et coutumes gardaient trace.
Ici en Bretagne occidentale, la tradition populaire, d’origine celtique à n’en point douter, obligeait à nommer la femme de son nom de jeune fille toute sa vie, épousailles ou non. Un postier d’outre Couesnon venant s’enquérir d’une dame en la nommant du patronyme de son mari se voyait rembarrer d’un froid « connais pas ». Je déplore qu’aujourd’hui les jeunes femmes mariées, y compris les bretonnantes, suivent de moins en moins cet usage.
Dans le même ordre d’idées, j’attends avec impatience l’arrivée d’une femme à l’Elysée (ou d’un homo) pour voir quel rôle sera dévolu au « premier monsieur de France ».
Pourquoi toutes ces considérations, me direz-vous. Eh bien parce que l’autre jour je partis pour une énième fois à la recherche de mon chat vagabond. Arrivé là où je sais que Monsieur descend régulièrement, je m’entends dire « vous l’avez manqué d’une demie heure ! » Mon informatrice traverse la rue pour demander à Monsieur Castor, si par hasard le félin aux mille maisons ne serait pas chez lui. Sur ces entrefaites arrive l’épouse de Monsieur Castor (que je me garderai bien de nommer Madame Castor), qui pas plus que son mari ne m’avait jamais vu auparavant et qui devinant l’objet des mes recherches me lance « Ah, vous êtes Monsieur Bistouri ! ». A ce moment j’ai compris le destin pluriséculaire des épouses nommées contre leur gré.
Bistouri KARAGAR (non mais !) ne réapparut que le surlendemain après quatre jours de vadrouille.