ETRE C'HOARZH HA DIC'HOARZH
GLAV
Il a enfin plu. Ne riez pas, depuis 45 jours, il n'a plus que quelques heures et le vent froid mais desséchant n'a rien arrangé. Quand on est jardinier, on observe le temps qu'il fait avec un peu plus de recul et de réalisme que la moyenne. Je suis souvent stupéfait de ce qu'une demie journée de temps gris efface dans la mémoire de beaucoup une semaine de soleil... Mes observations ne recueillent aucun écho dans mon entourage : le sujet de la météo est l'un des plus universellement partagés mais, paradoxalement, le plus propice aux âneries car on ne s'y intéresse pas vraiment. C'est dire ma satisfaction en découvrant au tabac, l'article qui faisait la une d'un quotidien régional : la photo d'un agriculteur montrant de pauvres graminées victimes du manque de pluie et... du vent desséchant. Une bonne matinée de pluie donc, suivie d'une ambiance crachineuse. On ne dit jamais assez à quel point l'humidité atmosphérique compte autant que l'hydratation de la terre. Je me souviens d'une année, dans mon ancien jardin, où la sécheresse sévissait. A tel point que des rhododendrons bien installés et de taille conséquente souffraient. Je ne pouvais, devant l'immensité de la tâche, que sélectionner les plus mal en point parmi les centaines d'arbustes. Ceux-là avaient alors au moins dix litres chacun. Mais l'embellie était de courte durée et très vite leur feuilles rivalisaient avec les oreilles d'un cocker. Une nuit, il crachina. La quantité d'eau reçue par chaque plante était négligeable et pourtant, quand je fis le tour du jardin ce matin là, j'eus le bonheur de voir toutes les feuilles dressées au ciel, pimpantes.
JAMBON BEURRE
L'autre jour, je dus me rendre sur mon lieu de travail pour y déposer mon nouvel arrêt de travail. J'y retrouvai ma remplaçante en train d'engloutir un jambon beurre. Depuis ma grosse angine, durant la quelle j'avais eu les plus grosses difficultés, mécaniques, à manger alors que la pénicilline (mais non, Aline n'a pas de...) rendait ma digestion difficile, j'ai gardé un rapport un peu particulier à la nourriture, domaine où je suis habituellement assez facile à contenter. Autant l'idée de certain aliments dont je suis normalement friand peut provoquer le dégoût, autant je peux me fixer sur l'idée d'un autre qu'il me faut absolument. Et ce jour là, ce fut le jambon beurre de Dame K. qui me fit saliver. (N'y voyez aucun sens cryptosexuel). Alors qu'une salade riz-thon-tomates-olives noires-batavia-fromage de brebis grec m'attendait toute prête, je me précipitai à la boulangerie en quête d'une baguette fraîche et à la charcuterie pour faire l'emplette de deux tranches de jambon sans colorants ni conservateurs. J'ai à peine poussé la porte en verre que je vois l'unique client qui me précède et je me dis : aïe! Néanmoins, je lui lance un aimable bonjour car le monsieur est sympathique. Il n'est autre que le patron du grand bar-tabac où je suis client régulier car il est le plus proche de ma boîte. C'est un monsieur qui doit approcher les 70 ans, grand, vif, rigolard, coquin avec les femmes. J'ignore pourquoi, mais ce monsieur s'est mis dans la tête que j'étais un bourreau des coeurs. J'ai souvent droit à des réflexions dans ce sens quand il me voit. "Oh, quelle belle bouille, y'en a encore qui vont tomber amoureuses!" Je lui répondrais bien qu'au quel cas, je ne m'en rendrais pas compte mais bon. Le temps de tourner la langue et le paquet de tabac est acheté de toute façon. Or, il est en train de faire du foin à la belle charcutière. Me voyant arriver, il baisse les bras : ah, c'est foutu pour moi! Il me prend à parti et attire mon attention sur les grains de beauté des bras de la charcutière, si sexy! "Hein, qu'elle est mignonne !" Et elle de répondre : "Ah, je suis mal barrée avec tous ces mecs." Ah, si j'avais pu être six feet under ! Avec billet de retour quand-même.
RHODOFOLIE
Ça m'a frappé d'un coup, aujourd'hui. Le jardin a tellement changé depuis l'année dernière à pareille époque. Il y a tous ces massifs qui ont remplacé ces vagues ilôts où de maigres plantes tentaient de se hisser au dessus des adventices. Il y a cette pelouse, qui à force de soins commence à y ressembler. Fraîchement tondue, elle me semble d'un luxe incroyable alors que mon ancien jardin était un pré tondu. Il y a tous ces rhodos et azalées plantés cette année qui mettent de la couleur partout et dont je profite de la maison alors que je ne voyais pas mon jardin de l'ancienne. J'ai vraiment plaisir à y déambuler, comme avant. J'y crois, je le vois, je le touche du doigt. Je pense qu'il va être plus réussi que l'ancien. D'ailleurs, cet ancien jardin, je n'y pense plus comme une entité. Quand mon esprit y vagabonde, c'est pour certaines plantes, en particulier. Moi qui aime les rhodos de bonne taille, qui aime qu'il me dépassent, qu'ils s'installent, créent leur micro univers, j'ai bien-sûr régressé de 15 ans. J'en ai certainement oubliés parmi les centaines que j'ai plantés mais parfois j'ai une pensée, pour l'un où pour l'autre : "Et toi, Moser's Maroon, tu poussais si vite, tu dois être sacrément grand maintenant, avec tes fleurs bordeaux et tes pousses de bronze, tu plairais à Vladimir..." Non, je n'ai plus la nostalgie de l'ancien jardin, d'autant moins que le nouveau me plaît, d'autant moins que le nouveau se fait beaucoup plus en communion, beaucoup plus à deux, paradoxalement, que le premier. Je réalise de plus en plus à quel point, cet ancien jardin, alors qu'il était notre passion commune, à mon ex et moi, je n'étais pas sur la même longueur d'onde qu'elle en le réalisant, et de moins en moins avec le temps. Ce qui me rend un peu triste toutefois, c'est qu'elle ne les aime plus, les rhodos. Je le sens bien, au téléphone. Ils se sont flétris avec mon départ. Je peux le comprendre mais, moi qui suis tout sauf un solitaire, moi qui ai besoin des autres, d'un autre en particulier, mais pas seulement, je sais que mes passions survivent au tempêtes de la vie car elle sont consubstantielles à mon être.
La semaine prochaine, j'irai voir mon ancien jardin. Ça me fait peur. Non pas de revoir tout ça, mais elle va être mal à son aise. Pourtant je ne dirai rien. J'essaierai un petit reportage comparatif...
Je n'ai pas que des rhodos! Loin s'en faut! Mais, en cette période, on ne voit qu'eux, est-ce ma faute? Et je les aime tant. Ce sont mes enfants. J'ai souri aujourd'hui, car j'ai entendu deux fois la réflexion que me faisait ma voisine, dans les Monts d'Arrée : tout ça, c'est des rhodos (fort accent sur le rho)! Un visiteur ce matin, et mon voisin cet après-midi, qui arrive à l'improviste alors que je plantais un... rhodo (mizer 'm eus bet!). Il m'a fait tellement peur que j'ai hurlé. Et il s'étonne des rhodos. C'est vrai que dans le cap maritime, on en voit peu.
Allez, en route...
Pelouse :
Couleurs :
Jaune/violet (Safron Queen, Azurro)
Bonheur pur : Azurro :
Le planté sur jour : Red Eye, encore en boutons :
Red Jack:
Graziella:
Anah Kruschke en boutons :
Frangrantissima :
Utilisation champêtre :
Promesses d'iris :
Geranium "Johnson's Blue" :
Aster du Cap (Afrique du Sud, hi!hi!):