PENN D'AR C'HORNÔG 1 - RANNDI
Il est remarquable que certaines longues indécisions semblent se résoudre l’espace d’un instant, comme par magie. Les arguments qui font peser la balance d’un côté ou de l’autre se détachent alors clairement, fruits sans doute d’une longue maturation inconsciente.
Ce matin là, au réveil, donc, je décide, prenant le contre parti de mes intentions précédentes, de vendre mon appartement quimpérois. Dès que je le pourrai toutefois. Car, à l’heure actuelle, la mésentente au sein de la copropriété, la menace qui pèse de l’un des propriétaires sur les autres, rendent toute transaction impossible, sauf à mentir effrontément à un acquéreur potentiel.
Je vais me défaire de ce studio sans état d’âme. J’aime la vieille ville, j’aime la proximité de la cathédrale qu’il m’a offerte – et j’ai fait écho à tout cela au long de mon cheminement bloguesque -, j’aimais aussi son aspect original, sa cheminée de pierre, son caractère ancien, loin du formatage architectural que nous proposent les résidences contemporaines. Mais je ne supporte plus le manque d’espace, l’absence du chant des oiseaux ivres de promesses de printemps, la lumière solaire invisible, l’atmosphère impalpable, l’outrecuidance des noctambules bruyants et agressifs.
Pourtant, ces trois ans passés ici, ont été sans doutes les plus « novateurs » de ma vie. Jamais jusqu’alors je n’avais été responsable que de moi-même alors que personne d’autre n’était responsable de moi. Bref, je n’avais jamais vécu seul avant, pas une journée. J’imaginais d’ailleurs en y aménageant, entamer une vie inédite de célibat, mais çà ne fut jamais vraiment le cas. Mes périodes de célibat réel furent si courtes qu’il est permis de penser, bien que je n’aie jamais été dans une recherche effrénée de compagnon, que quelque chose en moi fait, dans ma nature, que je trouve rapidement la compagnie d’une personne.
En signant le compromis de vente, quelques mois avant, j’imaginais toutes les facilités que m’apporterait ce logis urbain. La douce chaleur en hiver et la fin des corvées de bois, la proximité des commerces (7 km auparavant) et bien sûr, soyons honnête, la possibilité enfin de recevoir des amants facilement.
Eh bien, aucun amant de passage n’est jamais venu entre ces murs.
Il y a une dernière chose à dire sur ce lieu. J’y pense assez souvent. C’est ici, dans cette unique pièce, que Fromfrom et Cornus se connurent et se virent pour la première fois, virtuellement bien sûr. Cet appartement restera à mes yeux le lieu de leur rencontre. Autant dire, au final, qu’il aura eu plus de conséquence dans leur vie que dans la mienne.