ENGLAND - CYMRU - YNYS MÔN
Anglesey ou Ynys Môn selon qu'on parle anglais ou gallois est une île assez vaste séparée du reste du pays par un détroit, le Menai, qui ressemble à un fleuve, à tel point que les gallois l'appellent Afon Menai (la rivière Menai) alors que c'est un bras de mer.
Mais notre première escale est de ce côté-ci du détroit, pour visiter le château de Caernarfon, une forteresse assez célèbre par sa taille et sa silhouette impressionnantes, si bien que je pense que tout le monde en a déjà vu des images.
Impressionner est le mot puisqu'il semble bien que là fut le rôle premier de ce château bâti par Edward I d'Angleterre après sa victoire sur le pays de Galles et qui fut une des plus importantes puissances de feu du Moyen-âge, dit-on. Le roi anglais dépensa une fortune pour bâtir plusieurs autres châteaux dans la zone, tous de grande ampleur. L'architecte était un savoyard, Jacques de Saint Georges. Cela n'empêcha pas les rébellions galloises; le château fut même repris momentanément plusieurs fois. Outre le château, la ville fut ceinte d'une muraille toujours en place.
Le château est lui même une immense enceinte car les logis intérieurs ont, soit disparus, soit ils n'ont pas été achevés. Il se distingue des autres forteresses de la "série" par ses tours polygonales et une certaine polychromie de la maçonnerie. Une théorie veut qu'on cherchât à imiter les murailles de Constantinople. Rien de moins. Il partage avec d'autres, par contre, ses tourelles vigies qui se dressent vertigineusement sur les tours (parfois au nombre de deux par tour !) qui sont à la fois très enthousiasmantes pour le visiteur (sensation au sommet d'être vraiment dans le vide et vues incroyables sur les châteaux) et très étonnantes au sens où elles semblent plus fragiliser le château que présenter un quelconque intérêt stratégique... Impressionner, une fois de plus? En tout cas, je n'avais jamais vu ça.
J'ai aimé ces remparts sur mer.
Qui s'accrochent au château lui-même:
Autre originalité, ces couloirs à l'intérieur des murs - au moins d'un côté - qui permettent, sur deux niveaux, d'aller d'une tour à l'autre à couvert. L'ascension de celles-ci et le tour du château sont assez éprouvants et valent bien une montagne!
La plus grande et la plus belle des tours (la tour de l'aigle), accueillait le roi lors de ses visites. Elle a trois tourelles !
J'ai été très impressionné (c'était le but, non?) par cette bâtisse qui tient un peu du conte de fée, malgré une foule un peu encombrante et bruyante. A l'entrée nous nous laissons convaincre d'acheter un billet forfaitaire pour aller voir (dans certaines conditions) tous ses copains.
Il y a aussi beaucoup d'aspects symboliques dans la construction de ce château, et des autres, liés souvent à des traditions galloises antérieures que les monarques anglais ont confisquées à leur profit. L'investiture du prince de Galles (1969) est un lointain avatar de ces pratiques. Elle eut lieu dans ce château même et il fut fortement conseillé au futur prince de faire son discours en gallois. La "chaise" resta longtemps en place dans la cour et Vladimir enfant y posa même son postérieur. Il me montra l'endroit exact. Mais je ne suis pas en reste ! Il y a plus de 25 ans, alors que j'étais en hésitation devant un distributeur de café de l'université d'Aberystwyth, un vieux monsieur, présumant que je ne pouvais rien chercher d'autre, s'approcha de moi, me montra un bouton et me dit "gyda llaeth". Je fus très fier de comprendre d'emblée qu'il me montrait comment mettre du lait dans mon café. Et lorsqu'il se fut éloigné, quelqu'un s'approcha de moi et me dit : "Sais tu qui c'est? C'était le prof de gallois du prince..."
Nous traversons le détroit et mettons le cap sur Caergybi/Holyhead, une île reliée à l'île au moyen de ponts.... Autant je trouvais que le ciel plombé seyait au château, autant j'espérais un temps plus lumineux pour la suite. Je fus exaucé. Le temps changea trop vite pour que je comprenne comment...
Nous longeons la côte vers notre destination, en quête de notre halte déjeuner (pique-nique quotidien), quand j'ai soudain l'impression d'être revenu en Bretagne...
Ce sera donc là. Nous continuons ensuite vers Southstack, point culminant d'Anglesey et site d'un phare étrangement situé, le long d'un littoral superbe.
Les hauteurs de la pointe agrippent les dernières nuées...
Le phare est sur un rocher en mer (stack) relié par un pont. Hélas, il est déjà fermé quand nous arrivons mais la descente jusqu'au pont par un escalier en zigzag, sur le flanc d'une impressionnante falaise, secoués par un vent qui manque plusieurs fois d'arracher mon appareil photo nous comble néanmoins.
Curieusement, le phare est allumé, et avec un peu de persévérance, je capture ceci :
Mais je continue à m'amuser avec le phare (ça n'est pas si souvent que je vois un phare "d'en haut" !)
Avec ce vent la mer ne dit rien qui vaille...
La vue est superbe sur North Stack et son ancienne corne de brume. Mais la côte est si haute que les nuages lui grattent l'échine.
Le temps passe vite et nous avons juste le temps, sur le chemin du retour de faire une escale à Beaumaris. C'est un autre de ces châteaux edwardiens, resté inachevé quant à lui. Trop tard pour le visiter, le plus beau est sans doute le plan à double enceinte, qui ne se voit que du ciel...
Nous nous contentons de le longer un peu et d'admirer le Menai.
Enfin, je cherche un point de vue éloigné, d'où on peut le voir avec le massif du Snowdon à l'arrière. L'occasion de côtoyer un vieux chêne. Ça faisait longtemps...