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EN ALAN AR MEURVOR
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23 novembre 2008

KARAGAR TOMBE SUR LE CUL

300px_Soissons_saint_jean_des_vignes_1_Il n’y a pas si longtemps, dans le poste du 14 novembre, je disais ceci : « Plus tard, mais encore tout gamin, je vis Reims. » Nous étions allés là bas  rendre visite à l’aîné de mes oncles. Je me souviens d’une chose, c’est que lors du voyage en voiture, nous traversâmes Soissons et passâmes devant l’abbaye Saint Jean des Vignes. De l’immense église gothique de l’abbaye, il ne reste qu’une façade à deux flèches dont la rosace vide est béante sur le ciel. Trop petit que j’étais, je ne savais pas que nous étions à Soissons et cette image de façade fantomatique et grandiose m’était restée en mémoire comme un rêve. C’est très longtemps plus tard, devenu alors connaisseur des églises gothiques, que je vis une photo de cette façade, compris que Soissons était sur la route de Reims et que je n’avais donc pas rêvé. Tout cela me revient en mémoire à l’instant et je réalise que c’est proche d’une scène de mon roman. L’inconscient était encore à l’œuvre.

Revenons à mon oncle. Je le voyais encore moins souvent que les autres et il me semblait appartenir à un autre monde. Je n’ai jamais pu croire qu’il fût réellement le frère de mon père. Les trois autres frères se ressemblaient beaucoup physiquement, par leur minceur et les traits de leur visage, assez semblables à ceux du Prince Charles (on ne rit pas !). L’oncle de Reims était de forte corpulence, myope, blanc de cheveux très tôt et avait un accent français fort différent de celui des autres. Et puis, il n’était pas de la même condition. C’était un bourgeois, cultivé, sous-préfet ou un truc du genre, alors que mes deux autres oncles étaient paysans et mon père cheminot. Il avait trois enfants, deux garçons dont je n’ai aucun souvenir. L’un est mort depuis. Et puis une fille, Marie-Bénédicte. D’elle je me souviens très bien, de son visage et aussi parce que c’était une femme qui d’emblée m’avait plu.

Ce jour là, je passai mon temps penché du plus que l’équilibre me le permettait, pour apercevoir, de la fenêtre de l’appartement, cette immense et fascinante silhouette : la cathédrale. Je ne connaissais que Notre Dame de Paris, et savais déjà que Reims était une des très grandes œuvres du gothique. De mes parents, aucun n’eut la bonne idée de m’y emmener. C’est Marie-Bénédicte qui avait remarqué mon engouement et qui me montra des diapositives de Saint Rémi et de la cathédrale avant de m’y emmener. C’est un des premiers souvenirs de ma vie d’avoir fait une chose excitante. De ce temps, Marie-Bénédicte garda grâce à mes yeux, d’autant que ce que j’entendais dire d’elle, vie en Allemagne, mariage avec un allemand, divorce (parfum de scandale), retour en France, me semblait un peu plus rock ‘n roll que toutes ces cousines mariées à de ventripotents paysans dont on pouvait douter qu’elles les aient choisis. Je sus également qu’elle obtint plus tard l’agrégation d’allemand, à la place de première. Je n’ai pas vu Marie-Bénédicte depuis quelque chose comme 35 ans.

Ce soir, le téléphone sonne. J’ai un petit pincement au cœur, je ne suis pas tranquille avec cette demi grève à la SNCF.

Karagar ?

Oui.

C’est ta cousine Marie-Bénédicte. Tu te souviens de moi ?

Comment oublierai-je que tu m’as emmené visiter la cathédrale de Reims !

Tu te rappelles ça !

(J’explique en deux mots mon rapport aux cathédrales.)

Ainsi tu habites à P. ?

Oui… ???

Sais-tu que nous sommes presque voisins, j’habite dans le Finistère depuis neuf ans, au Relecq-Kerhuon et nous avons un mobile-home à Douarnenez, ça c’est plus près. Tu travailles toujours à France Bleu Breizh Izel ?

Je ne sais pas comment vous expliquer ça. Depuis trois jours, cette parenté révolue, oubliée, plus étrangère que la moindre de mes connaissances, originaire des antipodes hexagonaux de la Bretagne qui surgit, me trouve, sait des choses sur moi, choisit aussi la Bretagne ! Entendre cette cousine dire Breizh Izel, puis me parler de Diwan (en en prononçant bien la finale de surcroit !) c’est comme si mon jardin secret était soudain mis à jour.

Oui, nous parlons de Diwan car elle me demande quel est mon métier. A ce moment de la conversation, bien qu’elle sût pour la radio, elle ne connaît pas bien la nature de mes activités.

Je dois ravaler ma salive. J’ai une forte sensation de coming-out.

J’enseigne le breton.

Quand j’allais là bas, autrefois, je jouais avec mon petit cousin. Les cousins étaient tous adultes et mariés. Leurs enfants étaient de mon âge. Je lui parlais des phares en Bretagne, il me regardait d’un drôle d’air, il semblait ne pas comprendre. Sa passion à lui, c’était les tracteurs et nous en avions sous la main.

Quand j’ai dit mon métier, je me suis revu parlant des phares à mon petit cousin. Elle trouve en effet cela assez incroyable.

J’apprends des choses sur elle, plutôt sympathiques : l’enseignement supérieur de l’allemand à Brest, son homme, ingénieur qui a tout plaqué pour venir en Bretagne écrire des chansons.

Elle est volubile, pose plein de questions. Je n’avais pas prévu la plus évidente d’entre elles :

Tu es marié, tu as une famille ?

Pacsé, avec un garçon.

Pas d’importance, tu l’amènes si tu veux.

Nous devons nous voir dans 15 jours.

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Commentaires
K
Toujours sur le cul ?<br /> Non, je dis ça parce que c'est pas bon pour le mal de dos, et c'est pas aisé pour jouer du clavier...
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K
Ton inconscient guidait peut-être ta plume, euh tes doigts !
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K
Et bien si nous avons globalement tous réagi comme ça, c'est peut-être que tu avais mis dans tes posts plus d'émotion que tu ne pensais ?
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K
A tous> Eh bien ces évennement ont l'air de vous mettre en joie! Je précise donc mon état d'esprit : concernant Marie-Bénédicte, elle habite donc en Bretagne et les quelques éléments de la conversation liasse présager d'une rencontre intéressante, donc j'y trouve de l'intérêt, le lien de parenté n'est qu'un prétexte pour faire une nouvelle conaissance et de manière générale je suis assez excité à l'idée de rencontrer de nouvelles personnes. Pour les autres, je ne sais pas encore si j'irai à la grande réunion de tous les cousins mais quoi m'animera sinon un curiosité vis à vis de gens dont j'ai entendu parlé plusd que je ne les ai vus étant gamin. Il ne s'agit pas de réconciliation puisque je n'ai jamais été fâché. Il faut savoir que je suis le plus jeune et de loin de tous ces cousins germains (les plus éloignés je n'en connais même pas l'existence), que je n'en ai vus certains qu'une ou deux fois dans ma vie, qu'ils étaient adultes et moi enfant et donc on imagine assez qu'aucun lien de s'est tissé. Ils veulent se voir, alons y, mais je ne me sens aucune affinité particulière car comme je l'ai dit j'ai moins échangé avec eux qu'avec toute autre personne rencontrée dans ma vie.C'est différent de renouer ou de rompre (d') avec un frère ou une soeur car dans ce cas des choses ont été partagées : la vie familiale, donc ça n'est pas anodin. Pour mes cousins, je ne paartage avec eux que des gènes et le sang pour moi n'est rien, absolument rien.
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K
J'aime bien quand la vie nous surprend de cette façon ! Cette évolution récente des relations avec ta famille qui paraissait si éloignée, je trouve ça génial ! Je suis très touchée par ce que tu nous racontes ici.
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